Lire les poèmes de Leconte de Lisle à haute voix et en public, voilà la vraie manière de les apprécier. C’est encore mieux quand cela se passe dans le paysage grandiose de la Pointe au Sel, que le jeune Charles-Marie Leconte de L’Isle a certainement parcouru alors qu’elle s’appelait encore « Pointe de Bretagne ».
Quatre « diseurs » aux styles très différents ont relevé le défi devant une cinquantaine d’amateurs de poésie rassemblés dans la salle d’exposition du Musée du Sel.
Le meneur de jeu était Patrice Treuthardt en grand maitre du kabar. Il a choisi d’abord un texte qui magnifie le coucher du soleil avec « L’orbe d’or » puis il a évoqué « Le Piton des neiges » où « La lumière s’éveille à l’orient du monde ».
Au troisième et au quatrième tour son choix s’est porté sur des poèmes d’inspiration hindoue, la « Prière védique pour les morts » et « La Maya » déclinaison personnelle de Leconte de Lisle à partir des multiples sens du mot sanskrit.
Jaya Yogacharya, professeur de yoga et grande connaisseuse de l’hindouisme, a enchainé avec une diction très classique. Son premier choix de texte s’est aussi porté sur un hymne védique : « Sourya » antique divinité représentée par le soleil. Puis elle a rendu hommage à l’ermite légendaire, auteur du Ramayana, avec le texte spectaculaire intitulé « La mort de Valmiki »,. Changeant de registre, elle a présenté ensuite les brillants tableaux orientalistes que sont « Le sommeil de Leilah » et « Le Désert ».
Alain-Marcel Vauthier, président de l’Académie de l’Ile de La Réunion, a choisi de déclamer tout d’abord « Mille ans après », un texte qui, selon lui, «bat en brèche l’idée d’un Leconte Lisle tout froid qui ne fait qu’assembler les mots et ne vibre pas … ». Il nous a fait partager ensuite la beauté formelle de « La Vérandah » et nous a emmenés au loin avec « Le sommeil du condor » et « L’albatros ».
Mohamed Absoir, étudiant et slameur, a adapté avec bonheur le flot de sa parole au rythme impeccable de la métrique de Leconte de Lisle. Il a d’abord choisi de nous émouvoir avec « Le frais matin dorait », l’histoire d’un amour brisé dans son élan, puis avec la mélancolique beauté des « roses d’Ispahan ». Poussant plus loin le voyage et la découverte il nous a conté ensuite « La genèse polynésienne » où « L’être unique, le grand Taaroa se lève … Pôles, rochers, sables, mers pleines d’îles, Soyez !
Il termine avec un texte brûlant d’actualité sur le requin « sinistre rôdeur des steppes de la mer ». Le texte est intitulé « Sacra fames – la faim sacrée ».